Face à Villiers, Sarkozy persiste dans ses cabritudes

Publié le par Quotidien de Babylone

Intervention de Philippe de Villiers
Séance plénière au Parlement européen, Strasbourg, 21 octobre 2008
Conclusion du conseil européen.

En une minute, monsieur le Président, je voudrais dire que, vous avez été amené, vous même, pendant cette crise financière à bousculer des dogmes des institutions Bruxelles, Frankfort, la concurrence, les critères de Maastricht, le libre-échangisme mondial, l'interdiction pour les Etats d'aider les entreprises et en particulier les banques, etc.
Vous avez évoqué à l'instant l'affaire des fonds souverains qui est extrêmement importante pour l'avenir pour sauver nos entreprises, lorsqu'elles seront, puisqu'elles sont à vil prix.
Or aujourd'hui, M. le Président, le Traité de Lisbonne que les dirigeants européens et vous même en particulier cherchez à maintenir en vie artificielle, ce traité de Lisbonne vous aurait empêché de faire ce que vous venez de faire. Il interdit toutes les restrictions aux mouvements de capitaux, il interdit toutes les interventions et toutes les influences politiques sur la banque centrale (européenne) et surtout les aides d'Etats pour toutes les entreprises.
La question est simple, quel choix, Monsieur le Président, allez vous faire, avoir les mains liées ou avoir  libres ? Pour avoir les mains libres, il ne faut plus le Traité de Lisbonne mais un Traité qui tienne compte des leçons que tous ensemble nous venons de vivre.

Réponse de Nicolas Sarkozy ( Extraits)

C'est peut-être le seul accord que j'ai avec Monsieur de Villiers, c'est qu'il faut peut-être s'affranchir de dogmes qui ont fait beaucoup de mal à l'idée de l'Europe, dogmes qui sont d'autant plus illégitimes que bien souvent ils ne sont pas le produit de décisions d'organismes démocratiques et donc légitimes. Et en Europe, l'idéal européen qui est le mien est suffisamment fort pour que la démocratie européenne soit une vraie démocratie. La pensée unique, les dogmes, les habitudes, les conservatismes ont fait beaucoup de mal. [...]
Monsieur de Villiers, oui j'ai bousculé des dogmes parce que je crois au pragmatisme, mais vraiment ne prêtez pas à Lisbonne, au traité, des défauts que ce traité n'a pas. Je suis bien placé pour savoir que le traité de Lisbonne n'est pas une merveille et une perfection. Et d'ailleurs, Monsieur de Villiers, sauf en Vendée, la perfection n'est pas de ce monde, surtout, Monsieur de Villiers, quand on construit un ensemble de 27 pays aux gouvernements différents, aux histoires différentes. Arrêtez avec le traité idéal dont vous savez parfaitement qu'il n'existera jamais. Les européens sont des pragmatiques, des gens de bons sens, qui préfèrent un traité imparfait mais qui améliore la situation plutôt qu'un traité parfait qui n'existera jamais parce que jamais il n'y aura d'accord au service de cette idée virtuelle.
C'est ça l'Europe! Progresser chaque jour! Parce que nous avons voulu mettre un terme à la guerre, parce que nous voulons créer un espace démocratique, je crois Monsieur de Villiers que votre intelligence devrait être mise au service d'un autre combat que celui qui consiste à vous trouver un ennemi illusoire, alors qu'on voit bien que dans la crise actuelle, les européens ont compris qu'être ensemble est un atout et non pas une faiblesse. Et même avec toute la force que vous avez et le talent qui est le votre, seul face à cette crise financière vous ne seriez rien. Et il vaut mieux un bon compromis de toute l'Europe que la certitude d'avoir raison seul dans son coin.
Sur les mains libres, cher Philippe de Villiers, ma réponse vaut pour vous! C'est la réponse d'un homme libre y compris dans les débats politiques français. Je crois que ce qu'il y a de plus important pour nous, c'est d'arrêter de parler la langue de bois. Je pense que les bons compromis sont faits par des gens sincères qui vont au bout de leurs idées et que le défaut du débat politique européen c'est la passivité qui nous a tous frappé, toutes familles politiques confondues, comme tétanisés à l'idée de porter quelque chose de nouveau.
Si l'Europe a avancé, c'est qu'à un moment donné, des femmes et des hommes ont défriché de nouveaux territoires. Et l'autocritique auquel on m'appelle, nous tous devrions la faire. Depuis longtemps, en Europe, on s'est comporté comme des immobiles. On a suivi les fondateurs mais on n'a pas fait comme eux, on n'a pas défriché de nouvelles routes, on n'a pas porté de nouvelles idées. Je crois profondément qu'au point où nous en sommes, il va falloir faire preuve d'imagination et que, au fond, le pire risque est celui de ne pas en prendre, aujourd'hui, et de ne pas faire preuve d'audace face à une situation tout-à-fait nouvelle.

Publié dans Europe

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article